dimanche 27 décembre 2009

CUM PERMISSU SUPERIORUM : cette considération pour l'Antiquité dans un livre merveilleux...



On a beaucoup discuté sur les deux colonnes du Temple salomonien. La meilleure explication à leur sujet semble devoir être cherchée dans l'ordre des références cosmiques, en rapport avec la très ancienne observation rituelle du soleil au cours de l'année. L'observateur se plaçait au centre du lieu sacré, face à l'Est, c'est-à-dire face au soleil levant, sur un siège rituel placé en un lieu précis et invariable. Il suivait les déplacements progressifs des levers héliaques à l'horizon entre les deux limites extrêmes atteintes aux solstices d'été et d'hiver. On marquait sur le terrain ces deux points essentiels par deux mâts, deux menhirs dans certains alignements préhistoriques de Bretagne ou d'Angleterre (la ligne équinoxiale y est parfois signalée par un bétyle), ou, dans les temples plus élaborés, par deux colonnes. De telles colonnes ont été retrouvées de part et d'autre de certains temples anciens orientés vers l'Est, comme l'était aussi celui de Jérusalem. Le cas des deux pylônes situés en avant de l'entrée des temples égyptiens est particulièrement intéressant, car ils font corps avec l'édifice, sans avoir pour autant le moindre rôle architectonique : à première vue ils ne servent à rien. Ils constituent un précédent à nombre de nos églises d'Occident dont le massif Ouest, côté grand portail, est surmonté de deux tours-clochers dont l'origine n'apparaît pas au premier abord. Or cette formule est à situer dans la ligne d'évolution des portes du soleil de l'Antiquité, ainsi dénommées parce qu'elles étaient construites pour que l'observateur rituel placé sur son siège voie le soleil se lever, au solstice d'été, contre le montant de gauche, au solstice d'hiver contre celui de droite ; on ajouta par la suite un portique transversal de manière à réaliser une porte monumentale dans laquelle se levait chaque matin l'astre du jour. L'arc de triomphe était né ; on l'orna de plus en plus, souvent d'un char d'Apollon ; le héros qu'on y faisait passer n'était pas seulement un roi-soleil, il était assimilé au dieu. La ligne médiane, dans l'axe de la porte, marquait le plein Est, et les jours où le soleil y apparaissait étaient les équinoxes. Remarquons enfin que le schéma symbolique de l'observation rituelle est le chrisme.


in INTRODUCTION AU MONDE DES SYMBOLES,
de Gérard de Champeaux et Dom Sébastien Sterckx o.s.b.,
La Pierre qui Vire
, 1972.